Résumé:

Cette génération est celle des années 70 avant JC à 50 avant JC.

Suivant notre comptage, cette génération est la génération 44 associée au psaume 44. C’est dans ce psaume 44 que nous retrouvons donc une illustration des faits de cette génération.

Cette génération est marquée par la la lutte de succession d’Alexandre Jannée entre ses deux fils Aristobule (II) et Hyrcan (II), après la régence d’Alexandra. Débute aussi la cohabitation réelle entre Rome et le peuple d’Israël: Rome s’empare de Jérusalem et commence à dicter sa loi en Judée.

L’arrivée des romains inaugure une nouvelle ère peu favorable pour le peuple Juif.

À la mort d’Alexandra, Aristobule II déclare la guerre à son frère Hyrcan II qui assurait la charge de grand prêtre. Aristobule et Hyrcan finissent par conclure un accord de paix à l’avantage d’Aristobule. Cette situation ne satisfait pas Antipater, le père du futur roi Hérode, qui prend le parti d’Hyrcan et le pousse à revendiquer le trône.

Profitant de cette lutte fratricide, les romains s’invitent en Judée, leur alliance étant recherchée par chaque parti (Aristobule et Hyrcan). Pompée (Rome), dans un souci tactique, semble dans un premier temps soutenir Aristobule, mais ne cesse de le tester et finit par se faire remettre la souveraineté des forteresses de Judée.

Aristobule se réfugie alors à Jérusalem. Lorsque Pompée menace Jérusalem, Aristobule tente un dernier arrangement avec Pompée, mais il n’est pas suivi par ses troupes. Le peuple Juif se divise, une partie collabore avec Pompée, l’autre est déterminée à lui résister.

Après trois mois de siège, le Temple tombe aux mains des romains. De nombreux Juifs meurent. Pompée est le premier « profane » à pénétrer le Saint des Saints,. En dehors de cette profanation, il ne touche ni ne pille les objets sacrés.

Aristobule est fait prisonnier. Crassus qui gouverne la Judée, n’hésite pas, contrairement à Pompée, à piller le Temple pour mener sa guerre contre les Parthes. Ce pillage ne fait qu’initialiser une longue période de domination. Cette fois l’ennemi est d’un autre calibre.

Développement:

La succession d’Alexandre Jannée

Cette génération est marquée par la réelle succession d’Alexandre Jannée après la régence d’Alexandra.

Mais à la lutte entre les deux fils d’Alexandre Jannée, Aristobule II et Hyrcan II vient se greffer l’arrivée des romains sur l’échiquier de la Judée. Si depuis l’arrivée des Grecs à travers Alexandre le Grand, les romains se sont plus ou moins intégrés à l’horizon du peuple Juif, cette génération voit le début de la cohabitation réelle entre Rome et le peuple d’Israël, les deux peuples frères.

Rome s’empare de Jérusalem et commence à dicter sa loi en Judée.

L’arrivée des romains inaugure une nouvelle ère peu favorable pour le peuple Juif.

Lors de la régence d’Alexandra, Aristobule avait déjà montré ses ambitions en s’emparant de nombreuses villes. Mais Alexandra avait, de son vivant, pu gérer les ambitions d’Aristobule. Sa mort précipite le royaume de Judée dans les griffes de Rome.

Flavius Josèphe termine le treizième livre des « Antiquités Juives » sur le bilan du règne d’Alexandra avec cette conclusion qui introduit la présente génération assez clairement :

  • Ainsi[1] sa mort (d’Alexandra) fut suivie de troubles et de malheurs ; mais tout son règne se passa en paix.

À la mort d’Alexandra, Aristobule II déclare la guerre à son frère Hyrcan II qui assurait la charge de grand prêtre. Aristobule et Hyrcan finissent par conclure un accord de paix à l’avantage d’Aristobule. Accord a priori satisfaisant pour Hyrcan qui n’avait pas d’ambition particulière.

Antipater

Cette situation ne satisfait pas Antipater, le père du futur roi Hérode, qui prend le parti d’Hyrcan et le pousse à revendiquer le trône.

Antipas (Antipater) organise ainsi la fuite d’Hyrcan à Pétra sous la protection du roi arabe Arétas auquel Hyrcan fait des promesses territoriales dans le cas où il retrouvera le trône. Fort de cette promesse, Arétas envoie une armée de cinquante mille hommes contre Aristobule. Profitant de cette lutte fratricide, les romains s’invitent en Judée.

Leur alliance étant recherchée par chaque parti (Aristobule et Hyrcan).

Pompée

Scaurus, l’envoyé de Pompée adopta dans un premier temps le parti d’Aristobule et obtint le retrait des troupes d’Arétas. Ceci n’empêcha pas les deux frères d’essayer de faire régler leur différend directement par Pompée.

Pompée, dans un souci tactique, semble dans un premier temps soutenir Aristobule, mais ne cesse de le tester et finit par se faire remettre la souveraineté des forteresses de Judée.

Aristobule se réfugie alors à Jérusalem. Lorsque Pompée menace Jérusalem, Aristobule tente un dernier arrangement avec Pompée, mais il n’est pas suivi par ses troupes. Le peuple Juif se divise, une partie collabore avec Pompée, l’autre est déterminée à lui résister.

Après trois mois de siège, le Temple tombe aux mains des romains d’autant plus facilement qu’ils mettent à profit le jour du Shabbat, pendant lequel ils ne risquent aucune attaque des Juifs, pour optimiser le montage de leurs machines de sièges. De nombreux Juifs meurent. Pompée est le premier « profane » à pénétrer le Saint des Saints,. En dehors de cette profanation, il ne touche ni ne pille les objets sacrés:

  • Lors[2] donc que la plus grande tour eut été ébranlée par les machines, et qu’en tombant elle eut fait tomber avec elle le mur qui en était proche, les Romains se pressèrent d’entrer dans la brèche. Le premier qui y monta fut Cornélius Faustus, fils de Sylla, suivi de ceux qu’il commandait. Furius entra d’un autre côté avec sa compagnie, et Fabius donna entre eux deux et entra aussi avec la sienne. Tout fut incontinent rempli de corps morts. Une partie des Juifs furent tués par les Romains ; les autres s’entre-tuèrent eux-mêmes, ou se précipitaient ou mettaient le feu dans leurs maisons, la mort leur paraissant plus douce qu’une si affreuse désolation. Douze mille Juifs y périrent, peu de Romains, et Absalon, oncle et beau-père d’Aristobule, fut pris. La sainteté du Temple fut violée d’une étrange sorte, car au lieu que jusqu’alors les profanes non seulement n’avaient jamais mis le pied dans le sanctuaire, mais ne l’avaient jamais vu. Pompée y entra avec plusieurs de sa suite, et vit ce qu’il n’était pas permis de regarder qu’aux seuls sacrificateurs. Il y trouva la table, les chandeliers et les coupes d’or, une grande quantité de parfums, et dans le trésor sacré environ deux mille talents. Sa piété l’empêcha d’y vouloir toucher, et il ne fit rien dans cette occasion qui ne fut digne de sa vertu.

Cette défaite des Juifs contre les Romains justifie la complainte attachée au début du psaume de cette génération :

  1. Au chef des chantres, par les fils de Coré. Maskîl.
  2. Ô Dieu ! De nos oreilles nous l’avons entendue, nos pères nous l’ont racontée, l’œuvre que Tu as accomplie de leurs jours, aux temps antiques.
  3. Toi, de Ta main, l’œuvre que Tu as dépossédé des nations, et Tu les as implantés, eux ; Tu as ruiné des peuplades, et eux, Tu les as multipliés.
  4. Certes, ce n’est pas leur épée qui les a fait maîtres du pays, ni leur bras qui leur a donné la victoire : c’est Ta droite, Ton bras, la lumière de Ta face ; car Tu les avais pris en affection.
  5. C’est Toi qui es mon roi, ô Dieu ! Décrète les triomphes de Jacob.
  6. Grâce à toi nous enfonçons nos ennemis, avec l’aide de Ton nom, nous écrasons nos agresseurs.
  7. Car je ne mets pas ma confiance en mon arc ; ce n’est pas mon épée qui m’assure la victoire ;
  8. mais c’est Toi qui nous fais triomphe ; de nos ennemis, qui couvrent de confusion ceux qui nous haïssent.
  9. En Dieu, nous nous glorifions sans cesse, et à jamais nous célébrons Ton nom. Sélah !
  10. Pourtant Tu nous as rejetés et humiliés, et Tu n’accompagnes plus nos armées.

Pendant la traversée de la nuit, les ennemis du peuple d’Israël n’avaient jamais réussi à vaincre et à conserver l’avantage de la victoire. À chaque fois, un nouvel acteur a fait irruption et a relégué celui qui avait vaincu le peuple d’Israël dans les oubliettes de l’histoire tandis que le peuple d’Israël se reconstituait et finissait par retrouver sa souveraineté jusqu’à qu’un nouvel ennemi vienne à son tour se mesurer au peuple d’Israël.

Sous la dépendance de Rome

La victoire de Pompée marque en effet un tournant dans l’histoire Juive comme le résume Flavius Josèphe :

  • Ce[3] fut ainsi que la division d’Hyrcan et d’Aristobule, qui fut la cause de tant de maux, nous fit perdre notre liberté, nous assujettit à l’Empire romain, et nous contraignit de rendre ce que nous avions conquis par les armes dans le Syrie (qui englobait à l’époque la Judée). À quoi il faut ajouter que ces nouveaux maîtres exigèrent de nous bientôt après plus de dix mille talents, et transférèrent à des hommes dont la naissance n’avait rien d’illustre le royaume qui avait toujours été auparavant dans la race sacerdotale. Mais nous parlerons plus particulièrement en leur lieu de toutes ces choses.

Cette constante soumission du peuple Juif à Rome et à l’occident à travers les âges, les Juifs commencent à la découvrir dans cette génération en accumulant les revers militaires contre Rome.

Ainsi après avoir mâté la révolte d’Alexandre fils d’Aristobule, Gabinius, général d’armée de Rome, arrive également à vaincre Aristobule qui, après s’être échappé de Rome, essaie à son tour a résisté.

Aristobule sera ainsi refait prisonnier.

Crassus

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Alexandre, fils d’Aristobule, qui avait été épargné par Gabinius lors de leur première confrontation tente sans succès une nouvelle révolte contre les romains. Après le retour de Gabinius à Rome, c’est Crassus qui gouverne la Judée. Pour mener sa guerre contre les Parthes, Crassus n’hésite pas à piller le Temple :

  • Crassus[4], allant faire la guerre aux Parthes, passa par la Judée, et prit dans le Temple de Jérusalem non seulement les deux mille talents auxquels Pompée n’avait pas voulu toucher, mais tout l’or qu’il y trouva, qui montait à huit mille talents. Il prit aussi une poutre d’or massif qui pesait trois cents mines, dont chaque mine pèse deux livres et demie.

Ce pillage illustre la suite du psaume

  1. Tu nous fais reculer devant l’ennemi : ceux qui nous haïssent pillent à leur aise.

Ce pillage ne fait qu’initialiser une longue période de domination. Cette fois l’ennemi est d’un autre calibre.

Esaü

Si Jérusalem est associée au peuple Juif et en conséquence à Jacob, Rome est associée à Esaü, à qui Isaac a promis la souveraineté.

Derrière Rome, il faut comprendre l’occident.

Lorsque Pompée rentre dans Jérusalem, il prend l’aval sur Jacob. S’il ne souille pas le Temple, il s’introduit dans le saint des saints qui avait été promis à Jacob. Isaac avait promis la prêtrise aux descendants de Jacob. L’arrivée de Rome à Jérusalem marque la fin de la souveraineté de Jacob sur Jérusalem et sur le Temple.

Tout au long de l’histoire le peuple Juif continuera à subir la puissance de Rome, la puissance de l’occident. Plus jamais les armées d’Israël ne seront vainqueurs sur les armées d’Esaü. Esaü qui pense ainsi tenir sa vengeance sur son frère lorsque celui-ci se fit bénir par Jacob. Cette bénédiction engendra les cris et les pleurs d’Esaü.

Esaü tente à partir de cette génération de s’approprier la prêtrise qui lui avait échappé.

Pour cela, l’occident n’hésitera pas à attaquer sans cesse le peuple d’Israël tout en feignant de le protéger. Vont se poursuivre jusqu’à nos jours la destruction du Temple par Titus et les répressions sanglantes qui s’ensuivront ainsi que celles qui suivront la révolte de Bar Kokbah.

Puis viendront la fondation de l’église romaine et l’imposition progressive de statuts spécifiques pour les Juifs, les croisades, l’inquisition et les massacres du vingtième siècle.

Jusqu’à aujourd’hui, alors que les Juifs aient pu retrouver la souveraineté sur leur terre, l’occident n’hésite pas à jeter ses dernières forces dans la bataille pour empêcher les Juifs de retrouver la souveraineté sur le Temple et de reprendre ainsi leur rôle de prêtres des nations.

Pour cela, l’occident n’hésite pas à pousser Ismaël, l’orient, à s’attaquer à Jacob pour essayer de gagner cette dernière bataille.

Mais la confrontation risque de tourner court, car la dernière bataille risque de voir s’affronter orient et occident, et c’est à ce moment-là que Dieu se souviendra de son peuple et viendra enfin le libérer de la tutelle d’Esaü et lui redonnera la souveraineté sur Jérusalem et son Temple reconstruit.

Il est à remarquer que dans la présente génération, l’orient joue un rôle déjà prépondérant à travers Arétas, le roi arabe et le soutien constant des Arabes à Antipater.

C’est à tout ce futur du peuple Juif (par rapport à la génération qui nous intéresse) que les fils de Coré décrivent dans la fin de ce psaume :

  1. Tu nous livres comme des troupeaux dont on se nourrit, et nous éparpilles parmi les nations.
  2. Tu vends Ton peuple à vil prix, Tu n’estimes pas bien haut sa valeur.
  3. Tu fais de nous un objet d’opprobre pour nos voisins, la risée et la moquerie de notre entourage.
  4. Tu nous rends la fable des nations ; nous excitons des hochements de tête parmi les peuples.
  5. Tout le temps, mon déshonneur est là, sous mes yeux, et mon visage se couvre de honte,
  6. à la voix de l’insulteur et du détracteur, à la vue de l’ennemi, avide de vengeance.
  7. Tout cela nous est advenu, sans que nous l’ayons oublié, sans que nous ayons trahi Ton alliance.
  8. Notre cœur n’a pas rétrogradé, ni nos pas dévié de Ton chemin,
  9. pour que Tu dusses nous reléguer dans la région des monstres et nous recouvrir des ombres de la mort.
  10. Si nous avions oublié le nom de notre Dieu, étendu les mains vers un dieu étranger,
  11. est-ce que Dieu ne l’aurait pas constaté, puisqu’il connaît les secrets du cœur ?
  12. Mais pour Toi nous subissons chaque jour la mort ; on nous considère comme des brebis destinées à la boucherie.
  13. Réveille-Toi donc ! Pourquoi demeures-Tu endormi, Seigneur ? Sors de Ton sommeil, ne nous délaisse pas à jamais.
  14. Pourquoi dérobes-Tu Ta face, oublies-Tu notre misère et notre oppression ?
  15. Car notre âme est abaissée jusque dans la poussière, notre corps est couché de son long sur le sol.
  16. Lève-Toi pour nous venir en aide, délivre-nous par un effet de Ta bonté !

Cette génération fait partie de la 1ère garde de la nuit (générations 1 à 49).
Elle est donc associée à une malédiction du Lévitique (malédictions 1 à 49).

Lorsqu’Aristobule se réfugia à Jérusalem, Arétas l’assiégea avec une partie du peuple Juif qui prit le parti d’Hyrcan. Pour célébrer la Pâque, Aristobule désira offrir des sacrifices et essaya de trouver un arrangement avec ses assaillants :

  • Car[5] le jour de la pâque étant arrivé, dans lequel nous avons coutume d’offrir grand nombre de sacrifices, Aristobule et les sacrificateurs qui étaient avec les assiégeants de leur en donner, et qu’ils les paieraient ce qu’ils voudraient. Ceux-ci demandèrent mille drachmes pour chaque bête, et qu’on leur donnât par avance. Aristobule et les sacrificateurs en demeurèrent d’accord, et descendirent le long de la muraille avec une corde la somme à quoi cela se montait. Mais ces méchants, après avoir reçu l’argent, ne donnèrent point les victimes ; et ainsi, ne se contentant pas de manquer de foi aux hommes, leur impiété passa jusqu’à vouloir ravir à Dieu même les honneurs qui lui sont dus. Les sacrificateurs, se voyant trompés de la sorte, prièrent Dieu de châtier ces perfides ; et leur prière fut exaucée à l’heure même. Il envoya dans toute cette contrée un vent si impétueux qu’il ruina tous les fruits de la terre, en sorte qu’un muid de froment se vendait onze drachmes.

Ainsi à travers les animaux des champs qu’ils refusèrent à Aristobule, la Judée fut désolée.

La génération 44 de la nuit est sous l’emprise de la malédiction 17 du Lévitique :

  1. (l’animal du champ) désolera votre route.

Paul David

[1] Flavius Josèphe/Antiquités Juives/Fin du livre treizième (fin du chapitre 24)

[2] Flavius Josèphe/Antiquités Juives/Livre Quatorzième/Chapitre 8

[3] Flavius Josèphe/Antiquités Juives/Livre Quatorzième/fin du chapitre 8

[4] Flavius Josèphe/Antiquités Juives/Livre Quatorzième/chapitre 12

[5] Flavius Josèphe/Antiquités Juives/Livre Quatorzième/chapitre 3