Pour connaître les événements historiques que la fête de Hanuccah commémore, il faut se référer aux deux livres des Maccabées (premier et deuxième). Vous ne trouverez pas ces livres dans le canon de la bible hébraïque.
En effet les originaux hébreux de ces livres écrits vers l’an 100 avant JC ont disparus et ne restent que les traductions grecques plus tardives. Donc si vous souhaitez lire ces livres il faudra se contenter des traductions de cette version grecque dans la Bible chrétienne qui les a intégrées à son canon.
De l’ensemble des événements associés au combat des Hasmonéens contre les Grecs, la tradition juive n’a retenu que le miracle de Hanoukka.
La victoire des Hasmonéens, contre la logique des rapports de force, fait naturellement partie du souvenir Juif, mais le peuple Juif sait bien que les victoires militaires sont éphémères et que lorsqu’un danger est vaincu, un autre ne tarde pas à poindre.
Les livres des Maccabées ne faisant pas partie du canon de la Bible hébraïque, seul le passage suivant du Talmud fait référence aux événements associés au miracle de Hanuccah:
- La Guemara présente[1] l’origine de la fête de Hanoukka : – Quelle est la raison pour laquelle les jours de fête de Hanoukka ont été instaurés ? En rapport avec quel miracle les Sages l’ont-ils instituée ? C’est ainsi que les Sages ont enseigné dans une Beraïta (enseignement) : le 25 du mois de Kislev les jours de Hanoukka commencent. Il y a huit jours en tout, durant lesquels il n’est pas permis de prononcer une oraison funèbre ni de jeûner. Car lorsque les Grecs de Syrie (les Séleucides) entrèrent dans le sanctuaire, ils rendirent impures toutes les fioles d’huile se trouvant dans le sanctuaire, et lorsque la maison royale des Hasmonéens prit le dessus et les vainquit, (les Hasmonéens) cherchèrent dans l’enceinte du Heikhal (une des parties les plus saintes du Temple) et ne trouvèrent qu’une seule fiole d’huile qui était posée à l’abri avec le sceau du Kohen Gadol (le grand prêtre) encore intact, et elle ne contenait que la quantité d’huile suffisante pour allumer la Ménorah (le porte-lampes) pendant un jour. Cependant, un miracle fut accompli avec cette huile et ils purent allumer les lumières de la Ménorah avec elle pendant huit jours, jusqu’à qu’une huile rituellement pure ait pu être obtenue. Reconnaissant que ce miracle avait des implications pour l’éternité, l’année d’après (les Hasmonéens et le Sanhédrin) instaurèrent et firent de ces huit jours pour la postérité des jours de fête par la récitation du Halel et des remerciements.
Sur mon site (www.147thgeneration.net) je démontre que les psaumes de David racontent de fait l’histoire des Juifs depuis la mort de Salomon jusqu’à nos jours (et un peu plus), à raison d’un psaume par génération de vingt ans. Le psaume 1 pour la première génération (de -930 à -910), le psaume 2 pour la seconde et ainsi de suite jusqu’à la présente génération, la 147ème – d’où le titre du site – de 2010 à 2030.
J’ai consacré 20 ans a étudier les événements de chaque génération et à les mettre en rapport avec le psaume associé à la génération. Événements historiques, religieux, sociétaux ou culturels, les meilleurs et les pires.
Si votre esprit rationnel, au pays de Descartes, vous interdit de penser que les psaumes de David puissent avoir prédit d’une façon précise et fiable 3000 ans d’histoire juive par avance, vous pourrez quand même vous référer à mon site pour y découvrir tous les événements en rapport avec l’histoire juive – au sens large – pour chaque génération.
La fête juive de Hanuccah commémore la Nouvelle Dédicace (environ 165 avant JC) du second Temple de Jérusalem, trois ans après sa profanation par Antiochus IV Épiphane, roi de Syrie
. Cet événement est donc situé pendant la génération -170, -150 avant JC, soit par rapport à la première génération initialisée par la mort de Salomon, la génération 39 elle-même donc associée au psaume 39. On pourra donc se rapporter au psaume commenté correspondant sur mon site.
J’en rappelle quelques extraits.
Cette génération est marquée par la révolte des Maccabées. Celle-ci est largement justifiée par les exactions de l’occupant, Antiochus Épiphane. Ainsi nous pouvons citer l’épisode du supplice des sept frères :
- On arrête[2] sept frères. À coups de fouet et de nerf de bœuf, le roi Antiochus veut les obliger à manger du porc, viande interdite par la loi de Moïse. Un des fils parle au nom des autres. Il dit : « Qu’est ce que tu veux nous demander et savoir de nous ? Nous sommes prêts à mourir plutôt que de désobéir aux lois de nos ancêtres. » Le roi était très en colère. Il fait mettre sur le feu des grils et des bassines. Dès qu’ils sont brûlants, il commande de couper la langue à celui qui a parlé au nom des autres. Il donne l’ordre également de lui arracher la peau de la tête et de lui couper les pieds et les mains, sous les yeux de ses frères et de sa mère. Quand il ne peut plus bouger, le roi commande de l’approcher du feu et de le jeter encore vivant sur un gril. L’odeur de la chair brûlée se répand autour du gril. Pendant ce temps, les autres frères et leur mère se donnent de la force pour mourir avec courage.
Les autres[3] frères suivent le même sort chacun à leur tour rejoints dans la mort par leur mère sans avoir renoncé à la loi de Moïse et en continuant d’affirmer leur foi en Dieu et en sa justice.
Ce courage sans limite des Juifs face à la volonté d’Antiochus Épiphane de leur faire abandonner leur foi est ainsi illustré dans le début du psaume 39 où la référence à la langue prends une signification particulière par rapports aux supplices infligés :
- J’ai dit[4]: « Je veillerai à ma conduite, pour ne pas pécher avec ma langue ; j’aurai soin de mettre un frein à ma bouche, tant que le méchant sera en face de moi. »
- Je me suis renfermé dans un mutisme complet, j’ai gardé le silence, en l’absence du bonheur, alors que ma douleur était pleine de trouble.
À cette situation intolérable, la réaction ne va pas tarder à se faire jour à travers la famille de Mattathias. Lorsque les officiers du roi Antiochus arrivent dans la ville de Modine pour forcer une nouvelle fois les Juifs à renier leur religion à travers des sacrifices idolâtres, Mattathias se révolte :
- Dès[5] que Mattathias a fini de parler (pour refuser les offres avantageuses des officiers du roi Antiochus en échange de sa coopération), un Juif s’avance devant tout le monde. Il veut offrir un sacrifice sur cet autel de Modine, comme le roi l’a commandé. Quand Mattathias le voit son cœur se met à brûler d’ardeur, et son corps est tout tremblant. Une juste colère monte en lui, il court et égorge l’homme sur l’autel. Au même moment, Mattathias tue l’envoyé du roi qui oblige les gens à offrir des sacrifices, et il renverse l’autel. Il montre la même ardeur pour la loi de Moïse que Pinhas, quand il a tué Zimri, le fils de Salou.
Cette juste colère de Mattathias est évoquée dans la suite du psaume en reprenant d’ailleurs des termes quasi identiques :
Mattathias mène le début de la révolte et engrange les premières victoires envers l’ennemi et les Juifs qui avaient pris parti pour le nouveau pouvoir grec et ses croyances. Avant de mourir il cède le flambeau à son fils Judas qui fait pleine confiance en Dieu malgré le rapport de force défavorable par rapport aux grecs. Il remporte la victoire et purifie le Temple.
En fait la révolte des Maccabées n’était pas due à l’exacerbation d’un sentiment national mais était la seule réponse que pouvaient apporter Mattathias et ses hommes à la volonté délibérée d’Antiochus Épiphane de les détruire, d’anéantir leur foi.
C’est face à cette menace que Mattathias décide de se battre pour sauver ce qu’il peut de son peuple et tenter de rétablir la pureté du Temple.
Sans soutien divin, les chances de vaincre de Mattathias sont assez minces, ce qui justifie l’interrogation de David dans le psaume de cette génération qui interprète les angoisses de Mattathias que nous venons de citer :
- Fais-moi[7] connaître, Éternel, ma fin, et quelle est la mesure de mes jours : que je sache combien je suis peu de chose.
- Voici Tu as strictement limité mes jours, ma vie terrestre est comme un rien devant Toi ; oui, tout homme placé sur terre n’est qu’un souffle. Sélah !
Quand David, à travers le psaume de cette génération, reproche à Dieu de lui avoir strictement limité ses jours, Dieu prolonge justement les jours de la lumière produite par l’unique fiole d’huile encore pure retrouvée dans le Temple.
Elle devait durer un jour, elle durera huit jours.
Cette fiole d’huile pure est à l’image du peuple Juif. Isaac[8] évoque les sucs de la terre lorsqu’il bénit Jacob, ce qui comme nous l’avons déjà vu fait un parallèle entre l’huile d’olive utilisée dans le service du Temple et le peuple Juif dans sa caractéristique de peuple sanctifié, de peuple de prêtres.
La sagesse de ne retenir au niveau de l’événement que constitue la première victoire des Maccabées que le miracle de Hanoukka est une décision louable de nos sages.
En effet la victoire des Maccabées n’a effectivement pas suffi à mettre les Juifs hors de danger. Dès le lendemain de cette victoire, les ennemis d’Israël n’abandonnent pas leur combat, et jusqu’à présent les Juifs doivent continuer à se battre pour la souveraineté sur le Temple de Jérusalem.
Si on accepte que le psaume 39 soit associé à la génération de Hanuccah, le titre de ce psaume est :
- Au Chef[9] des chantres, à Yédoutoun. Psaume de David. »
Yédoutoun[10] est en effet un des trois chantres qui sont évoqués dans les différents textes bibliques. Les trois chantres sont en fait : Etan (ou Ethan), Assaph et Héman, Yédoutoun étant un autre nom de Ethan.
Or le miracle de Hanuccah est venu récompenser la réaction salutaire du peuple Juif. En effet, depuis la faute du veau d’or dans le désert, le peuple Juif a constamment été attiré par l’idolâtrie, cela a eu pour conséquence entre autre la fin du royaume d’Israël et l’exil des 10 tribus correspondantes.
La réaction des Hasmonéens marque la fin définitive des errements idolâtres dans le royaume de Judah et chez leur descendants, le peuple Juif.
Malgré cela, force est de constater que dans le millénaire qui a suivi, malgré la réaction salutaire des Hasmonéens, les Juifs ont continué a accumuler les malheurs. Ainsi lors de la génération associée au psaume 89 (830 à 850), le peuple Juif est en exil et subit à la fois la domination des descendants d’Esaü et de ceux d’Ismaël.
C’est Pourquoi Ethan, qui avait été pris à témoin par David dans la génération du miracle de Hanuccah prend la parole 1000 ans plus tard pour dresser un bilan amer du millénaire écoulé malgré la fidélité du peuple Juif:
- Et pourtant[11] tu l’as délaissé, rejeté, Ton élu ; Tu T’es emporté contre lui.
- Tu as rompu l’alliance de Ton serviteur, dégradé, jeté à terre son diadème.
- Tu as démoli toutes ses murailles, changé en ruines ses châteaux-forts.
- Tous les passants l’ont mis au pillage, il est devenu un objet d’opprobre pour ses voisins.
- Tu as élevé la droite de ses adversaires, rempli de joie tous ses ennemis.
- Tu fais reculer le tranchant de son épée, Tu ne le soutiens pas dans les combats.
- Tu as mis fin à sa splendeur, et son trône, Tu l’as fait crouler à terre.
- Tu as abrégé les jours de sa jeunesse, et Tu l’as enveloppé de honte. Sélah !
- Jusqu’à quand, ô Éternel, Te déroberas-Tu obstinément, et Ta colère brûlera-t-elle comme du feu ?
- Rappelle-Toi combien je suis éphémère, combien est vaine la vie que Tu donnes à tous les fils d’Adam.
- Est-il un homme qui demeure en vie, sans voir venir la mort ? Qui pourra soustraire son âme aux prises du Cheol ? Sélah !
- Où sont Tes anciens bienfaits, Seigneur, que, dans Ta sincérité, Tu avais promis à David ?
- Souviens-Toi, Seigneur, des outrages dirigés contre tes serviteurs, que j’ai eu à porter dans mon sein, de la part de peuples si nombreux ;
- outrages dont des ennemis, Éternel, m’abreuvent, qu’ils déversent sur les pas de Ton oint !
- Loué soit l’Éternel à jamais ! Amen et Amen !
Ainsi dès le début du psaume, Moïse évoque la toute puissance divine et par cela la perception que nous pouvons avoir du monde réel est bien sûr bien différente de ce qui est établi au niveau divin. Ainsi le millénaire évoqué par Ethan dans le psaume précédent, en tenant compte de l’écart de temps entre les deux psaumes extrêmes où celui-ci est soit auteur soit pris à témoin, n’est en fait pour Dieu que l’équivalent d’un instant, c’est ce qui est exprimé au début du psaume 90 :
- Seigneur[13], tu as été notre abri d’âge en âge !
- Avant que les montagnes fussent nées, avant que fussent créés la terre et le monde, de toute éternité, Tu étais le Dieu puissant.
- Tu réduis le faible mortel en poussière, et Tu dis : « Rentrez dans la terre, fils de l’homme ».
- Aussi bien, mille ans sont à tes yeux comme la journée d’hier – quand elle est passée, comme une veille dans la nuit.
La suite du psaume 90 est une promesse de joie pour le peuple Juif à la hauteur des malheurs qui l’ont accablé pendant les 3000 ans de la nuit, depuis la mort de Salomon (le matin symbolise la fin de la nuit) :
- Rassasie-nous[14] dès le matin de Ta grâce, et nous entonnerons des chants, nous serons dans la joie toute notre vie.
- Donne-nous des jours de satisfaction aussi longs que les jours où Tu nous as affligés, que les années où nous avons connu le malheur.
Bonne fête de Hanuccah …
Paul David
[1] Talmud de Babylone, Traité Chabat, 21b (édition Edmond J. Safra)
[2] II MACCABEES Chapitre 7, versets 1 à 5
[3] Voir II MACCABEES Chapitre 7
[4] PSAUME 39, versets 2 et 3.
[5] I MACCABEES Chapitre 2, versets 23 à 26
[6] Psaume 39, verset 4
[7] Psaume 39, versets 5 et 6
[8] Voir GENESE Chapitre 27, verset 28
[9] Psaume 39, verset 1
[10] Voir O. Odelain et R. Séguineau : « Dictionnaire des noms propres de la Bible ». Aux entrées : ETAN et YEDUTUN.
[11] Psaume 89, versets 39 à 53.
[12] Psaume 90, verset 1
[13] Psaume 90, versets 1 à 4
[14] Psaume 90, versets 14 et 15.