(L’image qui illustre cette génération est une carte du « monde connu » en 1025, pour connaitre à quelles entités correspondent les zones numérotées, se reporter en fin de page)

Résumé:

Cette génération est celle des années 1010 à 1030.

Suivant notre comptage, cette génération est la génération 98 associée au psaume 98. C’est dans ce psaume 98 que nous retrouvons donc une illustration des faits de cette génération.

A cette génération, le règne de Basile II a permis à Byzance de retrouver une puissance comparable à celle associée au règne de Justinien. Il meurt en 1025 sans laisser d’héritier, ce qui enclenchera le déclin de l’empire Byzantin.

En même temps que le déclin de l’empire Byzantin se dessine, celui du califat Omeyyade d’Occident est amorcé. La mort d’Abd al Malik en 1007 marque le début du déclin de ce dernier.

La disparition du califat de Cordoue poussera de nombreux intellectuels Juifs à émigrer vers de nouveaux cieux. Certains dans les nouveaux mini-royaumes musulmans (taifas) résultant de l’éclatement du califat. D’autres en terre chrétienne, en particulier dans les principautés chrétiennes du nord de l’Espagne. Celles-ci pratiqueront, pour quelques générations encore, une tolérance religieuse n’ayant rien à envier à celle prodiguée du côté des terres dominées par l’Islam.

Cette génération est la génération quatre-vingt-dix-huit soit la dernière de la deuxième garde de la nuit. Elle marque la fin d’un monde centré sur la Méditerranée. Après  les quarante-neuf générations d’exil au sein des nations de la deuxième garde qui se termine, le peuple Juif a pu se construire une nouvelle identité. Les synagogues ont pris le relais du Temple, la prière en guise d’holocauste.

Développement:

Venise

A Byzance, cette génération voit la fin du long règne de Basile II Bulgaroctone (976-1025). Pendant son règne, il établit une certaine stabilité intérieure par une meilleure équité sociale envers les pauvres. Il élimine provisoirement la menace russe grâce à la conversion au catholicisme de Vladimir en 989, contient la menace arabe et préserve ses intérêts en Italie.

En 1014, il met fin définitivement à la dernière menace, celle de l’expansion Bulgare qui avait subi de nombreux revers déjà quelques années plus tôt.

Il a également au cours de la génération précédente permis à Venise à s’affirmer comme puissance maritime en lui déléguant en partie la défense de l’Adriatique contre les menaces bulgares, slaves et arabes.

Si le règne de Basile II a permis à Byzance de retrouver une puissance comparable à celle associée au règne de Justinien, il meurt en 1025 sans laisser d’héritier, ce qui enclenchera le déclin de l’empire Byzantin.

Jusqu’alors, seules deux puissances avaient marqué l’Europe depuis la chute de Rome. Byzance du côté oriental et l’empire Omeyyade du côté occidental. En même temps que le déclin de l’empire Byzantin se dessine, celui du califat Omeyyade d’Occident est amorcé. La mort d’Abd al Malik en 1007 marque le début du déclin de ce dernier.

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La disparition progressive de ces puissances bipolaires permet l’émergence de nouvelles forces qui refaçonneront l’Europe. Une garde de la nuit représente quarante-neuf générations, cette génération est la génération quatre-vingt-dix-huit soit la dernière de la deuxième garde de la nuit. Elle marque la fin d’un monde centré sur la Méditerranée. Les peuples d’Europe du Nord autrefois Ariens, émergeront lentement à partir de la prochaine génération qui marquera le début de la troisième garde de la nuit.

Les taifas

Le renouveau du judaïsme initialisé lors de l’âge d’or du califat umayyade de Cordoue ne sera pas perdu.

La disparition du califat de Cordoue poussera de nombreux intellectuels Juifs à émigrer vers de nouveaux cieux. Certains dans les nouveaux mini-royaumes musulmans (taifas) résultant de l’éclatement du califat, d’autres en terre chrétienne, en particulier dans les principautés chrétiennes du nord de l’Espagne qui pendant les premières générations de la troisième garde pratiqueront encore une tolérance religieuse qui n’a rien à envier à celle prodiguée du côté des terres dominées par l’Islam.

La deuxième garde de la nuit

La deuxième garde qui comporte quarante-neuf générations a débuté à la génération cinquante et se termine sur cette génération. La génération cinquante (50/70 après JC) a été marquée par la destruction du second temple et le début de l’exil. Ainsi, la fin du culte sacrificiel remplacé par une relation directe du peuple avec son Dieu à travers la prière. C’est pour cette raison, que le psaume cinquante a rompu avec les psaumes précédents en ayant pour auteur Assaf. Assaf a une place privilégiée auprès de David dans l’exécution de la liturgie sacrée.

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Pour entamer la deuxième garde de la nuit, où le culte sacrificiel est remplacé par la prière, le peuple Juif ne pouvait avoir recours qu’à son héritage culturel du temps de la splendeur du royaume de David. C’est pourquoi, Assaf a initialisé cette garde en énonçant le premier psaume qui lui est associé.

Après  les quarante-neuf générations d’exil au sein des nations de la deuxième garde, le peuple Juif a pu se construire une nouvelle identité. Les synagogues ont pris le relais du Temple, la prière en guise d’holocauste.

Maturité du peuple Juif

C’est le cas dans le monde ashkénaze, sous l’impulsion de Rabbenu Gershom (950-1028) qui termine sa vie et son œuvre lors de cette génération. C’est également le cas en Espagne, où malgré la fin dramatique de Califat Omeyyade de Cordoue, de nouveaux esprits, à l’instar de Samuel ibn Nagrela, continuent à ensemencer le monde sépharade (essentiellement l’Espagne à cette époque).

Assaf a été relayé par les générations de l’exil de la seconde garde de la nuit. C’est cette maturité du peuple Juif, qui en résulte, s’exprimant par des liturgies renouvelées issues de l’exil (aux yeux des nations) dans un monde neuf débordant largement les frontières du monde antique (extrémités de la terre) que le psaume de cette génération vient commémorer :

  1. Psaume, Chantez à l’Éternel un cantique nouveau, car il a accompli des merveilles, soutenu par sa droite et son bras auguste.
  2. L’Éternel a fait éclater son secours ; aux yeux des nations, il a manifesté sa justice. Il s’est souvenu de sa grâce
  3. et de sa bonté pour la maison d’Israël ; toutes les extrémités de la terre ont été témoins du secours de notre Dieu.
  4. « Acclamez l’Éternel, toute la terre, entonnez des cantiques, chantez des hymnes ! »

Ce psaume n’est évidemment pas sans rappeler le psaume associé à la génération quatre-vingt-seize. Cela n’est pas fortuit. C’est en effet lors de cette génération, marquée par Hasdaï Ha-Nassi, que le renouveau juif se déclenche. La génération présente ne fait que consolider ce renouveau qui permet au peuple Juif de s’affirmer au sein des nations afin de mieux affronter la troisième et dernière garde de la nuit.

Le psaume de cette génération conclut sur le bilan de cette deuxième garde de la nuit. Car il célèbre non seulement la liturgie nouvelle (chants harmonieux) qui à la fois enrichit la liturgie plus ancienne (la harpe, allusion aux psaumes) et permet de s’associer à l’ouverture d’un nouveau monde.

Le monde antique était méditerranéen et moyen-oriental.

Depuis la destruction du second temple il a remonté doucement vers le nord.

Maintenant les deux piliers que sont l’Espagne musulmane et l’empire Byzantin commence à perdre leur influence et leur puissance pour laisser place aux pays du nord, la future Europe au-delà des mers et des montagnes.

C’est ce monde nouveau qui s’ouvre au peuple juif qui est évoqué dans la suite du psaume :

  1. Glorifiez l’Éternel avec la harpe, avec la harpe et des chants harmonieux ;
  2. le son des trompettes et les accents du Chofar, faites-les retentir devant le Roi Éternel.
  3. Que la mer élève ses clameurs, la mer et ce qui la peuple, la terre et tous ceux qui l’habitent !
  4. Que les fleuves battent des mains, qu’à l’unisson les montagnes retentissent de chants,
  5. à l’approche de l’Éternel qui vient juger la terre ! Il va juger le monde avec équité, et les nations avec droiture.
  • Cette génération fait partie de la 2ème garde de la nuit (générations 50 à 98).
  • Elle est donc associée à une malédiction du Deutéronome (malédictions numérotées 50 à 147 en continuité avec celles du Lévitique).
  • En effet les 2ème et 3ème gardes de la nuit sont celles du long exil des Juifs hors de leur terre et sans Temple à Jérusalem et donc sans service du Temple (défini dans le Lévitique). Le Deutéronome est une « redite » des lois adaptée à l’exil puisque ne reprenant pas les lois associées au service du Temple.

Ce monde nouveau commence à montrer son réel visage. Suite à la démence du roi Fatimide Hakim, de nombreuses synagogues et églises sont détruites en Palestine. Beaucoup considèrent que ces exactions sont la source des croisades. Avant Hakim, les chrétiens n’avaient pas besoin de détenir Jérusalem pour effectuer leurs pèlerinages. Dans notre génération, les exactions d’Hakim entraînent une réaction injustifiée des chrétiens envers les Juifs. Ainsi monte en Europe la rumeur que le Saint Sépulcre a été détruit, et que les instigateurs sont les Juifs. S’ensuivront des persécutions en particulier à Orléans. En Allemagne, Henri II ordonne l’expulsion des Juifs de Mayence :

  • Environ[1] une douzaine d’années après le synode de l’an 1000, l’empereur Henri II ordonna l’expulsion de tous les Juifs de Mayence. Certains songèrent à sauver leur vie et leurs biens en acceptant le christianisme. Parmi eux se trouvait un des fils de Rabbenu Gershom. Peu après, le fils mourut en chrétien. Son père porta le deuil comme s’il était mort en juif, accomplissant tous les rites funèbres de la loi talmudique.

Cet événement sera précurseur d’une attitude nouvelle du christianisme envers le judaïsme voulant lui imposer de force la « vraie » religion. Nombreux seront les pères à pleurer leur enfant oubliant leur foi ancestrale.

La génération 98 de la nuit est sous l’emprise de la malédiction 54 du Deutéronome:

  1. Maudits seront le fruit de tes entrailles.

Paul David

[1] Chaïm Potok : « Une histoire du peuple Juif ». Chapitre : « Le christianisme : perdus dans le pays enchanté »

Correspondance des entités numérotées référencées dans la carte au début de cette page:

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